Push Up

De Roland Schimmelpfennig

Ils sont prêts à s'envoler vers les bureaux de la direction, les filiales à l'étranger - ou bien ils sont à deux doigts d'être mis au placard. Agressivité, ruse, humiliation, cruauté, séduction, cynisme, jalousie sont les outils de travail quotidiens de six cadres, six guerriers du monde de l'entreprise.

Push Up aborde la multinationale et le monde capitaliste au travers de trois duos, trois duels de têtes pensantes et dirigeantes de l'entreprise. Mais qui sont réellement ces humains derrière ces combats ? Y a-t-il une très grande contradiction entre ce qu'ils donnent à voir et ce qu'ils vivent à l'intérieur ? Schimmelpfennig donne aussi à entendre leurs doutes, leurs désirs, leurs regrets, leurs frustrations, leurs vertiges - et l’immense solitude dans laquelle tous ils se trouvent.

Seuls les deux concierges de l’entreprise semblent être – un peu - à l'écart de cet effondrement.

Lui jeter le café à la figure, ça a été un dérapage. Une perte de contrôle. Mais elle ne méritait pas mieux. Cette petite merde ne méritait pas mieux. Elle était assise là, cherchant à se mettre en avant par son impertinence. Elle voulait tout simplement détourner la question. Voulait se montrer forte. Consciente de soi. Entraînée, mais pas si mal que ça. Avec son fichu costume bleu, dont elle a sûrement quatre autres pareils dans son armoire. Aucun goût mais des prétentions. Et du succès. Elle était assise là et elle ne touchait pas à son café. Ça l'avait excitée d'avoir dû attendre dix minutes debors. Au fond tout était déjà clair pour moi lorsqu'elle a franchi la porte. Je voulais juste la voir une demière fois. Elle était assise en face de moi et j'étais étonnée de son insolence. Cette insolence incroyable d'avoir demandé ce rendez-vous. Comment peut-elle ? Comment a-t-elle pu l'avoir avec l'allure qu'elle a. Avec ce piteux rayonnement de capacité professionnelle et d'ambition.

Création 2012

Mise en scène
Virginie Fouchault

Avec
Gérald Bertevas
Patrick Coulais
Laurence Huby
Laurent Ménez
Anne-Claude Romarie
Emmanuelle Trégnier
Sandrine Weiss
Cédric Zimmerlin

Scénographie et lumière
Jack Percher
assisté de Jean-Charles Esnault

Création sonore
Amélie Polachowska
Gérald Bertevas

Images
Matthieu Mullot
Anne-Claude Romarie

Costumes
Anne-Emmanuelle Pradier

Administration - Diffusion
Céline Moreau

Dates passées

Photos

Videos

Intentions de mise en scène

Ils sont prêts à s'envoler vers les bureaux de la direction, les filiales à l'étranger - ou bien ils sont à deux doigts d'être mis au placard. Agressivité, ruse, humiliation, cruauté, séduction, cynisme, jalousie sont les outils de travail quotidiens de six cadres, six guerriers du monde de l'entreprise.

Push Up aborde la multinationale et le monde capitaliste au travers de trois duos, trois duels de têtes pensantes et dirigeantes de l'entreprise. Mais qui sont réellement ces humains derrière ces combats ? Y a-t-il une très grande contradiction entre ce qu'ils donnent à voir et ce qu'ils vivent à l'intérieur ? Schimmelpfennig donne aussi à entendre leurs doutes, leurs désirs, leurs regrets, leurs frustrations, leurs vertiges - et l’immense solitude dans laquelle tous ils se trouvent.

Seuls les deux concierges de l’entreprise semblent être – un peu - à l'écart de cet effondrement.

Néanmoins derrière tout ça Schimmelpfennig va chercher la faille, l'humain, par petites touches. Et c'est cette opposition qui m'intéresse.

Qui sont réellement ces gens derrière ces combats ? A quel moment disent-ils la réalité ? Derrière quoi, derrière qui courent-ils ? Pour répondre à toutes ces questions, Schimmelpfennig interrompt régulièrement le duel qui oppose deux personnages pour laisser une place presque intime à l'un d'eux.

Quant à nous, sur le plateau nous irons chercher physiquement tous ces mouvements internes : les colères, les frustrations, les relâchements, les effondrements, les vertiges et l’immense solitude dans laquelle

se trouvent tous ces personnages.

Virginie Fouchault - janvier 2011

Notes sur la scénographie

Théâtre d'Air croquis sceno Push Up Dans Push up, on s’observe, on se teste, on triche, on parle à l’autre, on avance un pion, un mot, comme dans une partie de poker menteur,
on essaie de « savoir »…
on construit un parcours…
une silhouette compétitive…

 

Il y a cette apparence, et juste derrière ce voile du masque relationnel, une autre silhouette, sans fard, aux contours paradoxalement plus aléatoires mais dans ces soliloques qui nous dessinent un autre « être », le temps est compté : il faut repartir à l’assaut de la multinationale de 16 étages…

L’espace scénique se nourrira de ces apparences multiples, de ces mouvements. Des images dans lesquelles les protagonistes seront acteurs de leur propre environnement, tout au moins le croient-ils… Un « open space » en mouvement, se construisant, se déconstruisant, se reconstruisant, pour s’achever en une construction verticale, image glacée d’une multinationale érigée sur des parcours de « gagneurs ». Des surfaces lisses où l’image se reflète, où l’image se devine par transparence – dédoublement, multiplicité des facettes. Une matière, du « polycarbonate alvéolaire », plastique translucide laissant apparaître et disparaître les corps réels, les images réelles comme les corps et les images de la vidéo, acteur partenaire de l’espace.

JacK Percher - février 2011

Présentation de l'auteur

Théâtre d'Air photo Schimmelpfennig Push Up« Parmi les dramaturges de notre époque, Roland Schimmelpfennig apparaît comme un des plus poètes. Tout en agrandissant et radicalisant l’effet de fragmentation de notre monde, ses pièces sont comme des poèmes ; sauf que les strophes sont devenues des scènes et le rythme dramaturgie.
Ses pièces ressemblent à un kaléidoscope où les fragments mobiles de verre produisent d’infinies combinaisons d’images aux multiples couleurs. »          

L’Arche Editeur

Roland Schimmelpfennig est né en 1967 à Göttingen. Après un long séjour en tant que journaliste à Istanbul, il devient régisseur à la Otto-Falkenberg-Schule à Munich puis est engagé comme assistant à la mise en scène au Müncher Kammerspielen avant de devenir membre de la direction artistique de ce même lieu en 1995. Depuis 1996, il travaille comme auteur indépendant. Il a par ailleurs passé une année aux Etats-Unis en 1998 où il se consacre surtout à la traduction d’auteurs dramatiques de langue anglaise. Au cours de cette même année, il est lauréat du Prix Schiller de la région de Bade-Würtemberg (catégorie « Jeune Talent »).

De 1999 à 2001, Roland Schimmelpfennig est dramaturge à la Schaubühne à Berlin sous la direction de Thomas Ostermeier. Il devient entre-temps l’un des auteurs contemporains les plus joués dans les pays germanophones et jouit d’une réputation grandissante en Europe. Durant la saison 2001-2002, il est auteur en résidence au Deutsches Schauspielhaus de Hambourg. Parallèlement, il enseigne à l’Ecole Supérieure des Beaux-arts de Berlin-Weissensee.

Il a notamment écrit : en 1993, Fisch um Fisch, en 1996, Vorlanger Zeit im Mai, en 1997, Aus den Städten in den Wälder, aus den Wälder in die Städte, en 1999, Die arabische Nacht (Une nuit arabe, L’Arche Éditeur, 2002), en 2001, Push Up 1-3 (Push Up, L’Arche Éditeur, 2002), en 2002, Vorher / Nachher (Avant / Après, L’Arche Éditeur, 2003), en 2003 Die Frau von früher (La femme d’avant, L’Arche Éditeur, 2006) et en 2007, Besuch bei dem Vater (Visite au père, L’Arche Éditeur, 2009). Roland Schimmelpfennig vit actuellement à Berlin.

Production

Avec le soutien de la DRAC des Pays de la Loire, la Région des Pays de la Loire, le Conseil Général de la Mayenne, la Ville de Laval et la SPEDIDAM.

Coproduction Théâtre de Laval, Théâtre de l’Éphémère, Ville de Craon.

Le Théâtre d’Air est une compagnie conventionnée par le Ministère de la Culture et de la Communication - DRAC des Pays de la Loire.

Revue de presse

" Sur fond de Metropolis des temps modernes, six cadres d'entreprise composent un triptyque à couteaux tirés. Un "struggle for life" en version costume-cravate, tailleur et talons hauts acérés. (...) Dans ce jeu furieux des ambitions, où les ego se heurtent avec des chocs d'airain, la mise en scène alterne finement avec la mise en lumière de failles existentielles, judicieusement placées en contrepoint : manque de confiance en soi, vides affectifs... Seuls les deux gardiens, minuscules figures, assistent à ce théâtre tragique en portant un peu d'humanité. " Julien Bachellerie - La Montagne - 06/02/2014

" Ce qui plaît avec évidence, c’est le jeu avec la temporalité et la spatialité. Les scènes sont entrecoupées de brusques retours en arrière – telle la scène des amants dans le bureau du directeur – ou d’immersions dans l’intériorité des personnages, l’un soliloquant tandis que l’adversaire paraît comme en suspension, figé dans une pose, dans l’attente que le récit reprenne son cours. Ces changements rapides, d’un temps à un autre, d’un lieu à un autre, disloquant les scènes, mettent au jour ce que chacun dérobe aux autres, la solitude et le vide de chaque vie. Le moment de bascule est toujours surprenant, et les comédiens passent d’un registre à l’autre avec dextérité. 
La scénographie accentue l’écriture dramaturgique. Des panneaux de plastique translucides sur roulettes, déplacés au gré des duels, structurent des espaces variés, évoquant les lieux anonymes de l’entreprise et du foyer. Il faut aussi faire l’éloge des réalisations vidéo. En particulier, celle de la foule affairée qui, associée au déplacement des panneaux, donnent l’impression d’une démultiplication des corps, confondant acteurs réels et virtuels. Ou celle encore, toute poétique, de la chute des corps dans le vide. Si le monde de l’entreprise est cruel, le Théâtre d’Air aura gagné le pari de nous le rendre aussi drôle et émouvant. "
Fatima Miloudi - Les Trois Coups - 11/07/2012

" Démontant les clichés et soulevant l’hypocrisie de mise dans les grandes entreprises, Push Up met à vif l’intimité des personnages, notamment par le son et la vidéo. Fantasmes, cauchemars ou extrapolations sont projetés en grand, troublant la limite entre réel et virtuel et, par extension, celle entre vie privée et travail. Un investissement à perte admirablement transcrit par la présence des acteurs. (...) Quand Angelika, la femme du chef, se retrouve sur une chaussure, sa démarche boiteuse reflète son esprit : combatif, allant toujours de l’avant malgré les blessures morales. " Pascaline Vallée - mouvement.net - 04/09/2012

" En choisissant le texte de Roland Schimmelpfennig, Virginie Fouchault signe une mise en scène ciselée. Des plaques de plexiglas qui bougent et recréent la froideur d'une tour de verre et d'ivoire où le pouvoir se concentre au 16e étage, une lumière blanche qui souligne l'aspect impersonnel de l'entreprise. (...) Femmes de pouvoir en lutte contre elles mêmes et la pauvreté de leur vie sentimentale, duo homme-femme dont le pouvoir exacerbe le désir sexuel et enfin compétition entre deux hommes.
Push Up, c'est le paroxysme des travers du pouvoir en milieu professionnel, interprété par huit comédiens à la maîtrise parfaite de leur jeu. A voir. "
Noëlle Réal - AVI News - 12/07/2012